De Dora au bus magique
admin | 28 mai 2010Je reprends le fil de mon post de hier. Je ne suis pas un meilleur père qu’un autre. La télé est de facto une nounou de ma fille. La tranquillité apparente qu’offrent les chaînes pour enfants (du moins tant qu’ils ne savent pas changer de chaîne) se heurte aux publicités critiquées hier. Le prix à payer de cette tranquillité est que la société de consommation est inculquée à nos enfants, c’ est un prix trop cher à payer pour la tranquillité offerte.
Mais ce n’est pas tout. La manipulation des esprits infantiles peut aller assez loin. Ainsi prenons l’exemple de Dora. Dora est censé enseigner aux américains anglophones l’espagnol. Dora se trouve donc là-bas au milieu de la polémique sur l’immigration clandestine. Sondages à l’appui: ainsi pouvait-on lire il y a quelques jours: « 62% des personnes enquêtées sont prêtes à interdire leurs enfants du dessin animé Dora s’il s’avère que Dora est entrée illégalement aux États-Unis. »
Passons rapidement sur l’absurdité tant de la question que de la réponse. Mais voyons ce qu’est devenu Dora une fois l’atlantique passée: voilà que cette hispano est censée enseigner à nos chères têtes blondes… l’anglais. Dans quelle tête a bien pu naître cette idée débile? Je suis curieux de connaître les tenants et les aboutissants qui ont conduit à nier l’origine latino de Dora et à prendre le contre-pied de sa « fonction » originelle.
Au final de tous les dessins animés vus avec (ou sans – j’ai jamais eu besoin d’alibi) les pires sont biens les dessins prétendument éducatifs. Je suis certain que le label éducatif fait baisser la garde au plus attentif des parents.
J’ai regardé avec Evita, le bus magique. Cela portait sur le sport, on y expliquait comment fonctionnaient les muscles et le fait qu’ils avaient besoin d’oxygène et que s’ils n’avaient pas d’oxygène on avait des crampes. Accessoirement on expliquait qu’une femme moins entraîné et moins musclée pouvait battre un homme musclé ne sachant pas faire travailler ses muscles en équipe avec ses poumons et son cœur.
A aucun moment on n’évoqua le glycogène ni le fait que les muscles fournissent un effort pouvant être relativement long, en anaérobie… Trop compliqué? Certainement. De mémoire j’ai appris tout cela au lycée en cours de sciences naturelles. Et jusque là mon prof de sport m’avait expliqué (les rares fois où il me vit) qu’il fallait pour produire un effort fournir au muscle de l’oxygène donc bien respirer et du sucre donc correctement se nourrir, et qu’il fallait s’entrainer pour apprendre à bien gérer tout ça. Ce qu’il m’avait dit était simple, complet et vrai, même si cela ne me convainc nullement de m’adonner à quelque sport que ce fut (hors tennis de table mais que je considérais comme un loisir…)
Si c’est trop compliqué pour Evita pourquoi lui donner une information incomplète donc inexacte? Sous prétexte de rendre l’enseignement ludique est-il indispensable de fournir des informations partielles pouvant créer des convictions fausses dans l’esprit des enfants? Pourquoi les auteurs de dessins animés « éducatifs » ne tiennent-ils pas compte des raisons qui conduisent les pédagogues à établir des programmes et une progression dans l’acquisition des connaissances en fonction de l’âge des enfants?
Peut-être parce que les enfants sont les cadets de leur souci, que l’objectif est de donner bonne conscience aux parents qui utilisent la télé comme nounou et pensent aider ainsi leur enfants à progresser plus vite qu’en prenant le temps de faire découvrir le monde aux enfants. Nous adultes qui rêvons qu’apprendre soit pour nos enfants un plaisir, un loisir et non le fruit d’un effort considérable.
Je ne pense pas qu’on apprenne en s’amusant, ni que la notion d’effort puisse être dissocié de l’acquisition de connaissance, pas d’esprit critique sans souffrance. Plaignez ma fille, elle vit ses derniers mois d’insouciance…
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